Alertoplum

Dubillard : le mur

Dubillard est entré dans le mur en décembre 2911...

L'auteur de «la Maison d'os» est décédé mercredi à l’âge de 88 ans.

«Mais non, ma chérie, je ne pleure pas. Tu vois bien que ce sont mes lunettes qui fondent.»

 

"Sa femme se transforme en mur,

chaque soir quand il se couche

il n'en souffre pas.

Dans le noir,

il colle dessus son oreille,

et il écoute ce qui se passe derrière .

peut-être rien.

En tout cas,

c'est un grand silence."

Roland Dubillard

«Si j'étais encore un bébé, la première expression que je demanderais qu'on m'apprenne: c'est «Allez-vous-en!»» Cette notation, qui date de 1947, est une des premières des Carnets de Roland Dubillard et montre bien que la solitude et la marginalité sont bien ancrées en lui. L'écrivain, dramaturge, acteur, poète et homme de radio né en 1923 publie aujourd'hui, onze ans après un accident vasculaire qui l'a laissé hémiplégique, ces notes qui couvrent inégalement les années 1947 à 1997.Ces Carnets montrent la noirceur de l'univers dans lequel Roland Dubillard exprime son humour et sa fantaisie. «Ma mère avait un grand lit. J'y naquis je ne sais plus quel jour du mauvais côté.» L'existence de Roland Dubillard lui semble en soi une étrangeté. De son père mort quand lui-même avait treize ans, il dit: «Seul mon père avait le droit d'exister.» «Dans "avec toi, ce n'est pas toi qui me gêne. C'est: avec.» Rédigés en marge aussi de sa propre oeuvre, les Carnets sont pour Dubillard un lieu privilégié d'interrogation sur l'écriture. «Puisque j'écris pour n'être pas lu, pourquoi rester poli?» 1955: «J'ouvrirais mon tiroir pour y prendre mes poèmes, et je m'apercevrais qu'on me les a volés. Quel grand jour!»

 «La maladie qui l'emporta ne l'emporta pas bien loin.» Mais c'est cet apparent manque de sens qui fait sens pour lui, qui fait écriture. 1953: «Il avait des hallucinations dont il ne s'apercevait pas.» On comprend que le théâtre soit son mode d'expression favori. «Quand on est poursuivi par un vrai tigre, on court plus vite et plus longtemps que lorsqu'on fait semblant d'être poursuivi par un tigre.» il a l'idée que sa mort lui rappellera quelque chose, que c'est "la seule assiette digne de ma faim" .

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Le mur.

 

Sa patronne se transforme en mur.

Un mur bien mûr, tout décrépit, malgré les ravalements de façade, un mur qu'il a envie de détruire.

Non pas faire le mur, mais le défaire, l'anéantir, l'abolir, le faire "éclater aux quatre coins de Paris façon puzzle", avec de la dynamite ou bien avec cet engin qui détruit les immeubles, sorte de boule métallique gigantesque, balancier qui indique à sa patronne que son heure a sonné.

Les murs sont là pour séparer.

Séparons-nous des murs.

J.B.

 

(Atelier Plumes, décembre 2011 : consigne. Partir d'une phrase de Dubillard "Sa femme se transforme en mur" et écrire un texte bref).

 

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Mon frère se transforme en mur quand je lui parle d'enfance. Il ne sait pas où est la mienne. Il ne sait pas où est la sienne. Il pense que les deux chemins se sont croisés peut-être une fois ou deux mais que la forteresse du temps les a entouré de murailles  infranchissables. Quand je lui parle, je prends ma pioche pour desceller les pierres et creuser une meurtrière suffisemment grande pour y passer la main. Je lui fait un petit coucou du bout des doigts comme la petite fille agite sa main sur le quai de la gare pour dire adieu à un parent qui prend le train. Un jour, il finira bien par la remarquer cette  main de fillette qui lui fait signe, même si moi je ne vois qu'une main de vieille, tatouée de taches brunes jusqu'au poignet, qui se démène comme une sorte de folle... Mais j'agite les doigts, encore, comme une danse, comme un appel au petit garçon aux boucles drues et blondes. Il finira bien par retrouver le chemin du puit d'enfance, là où le temps prends sa source pour un jour et pour toujours.

 

MO

 

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 Son ami de toujours se transforme en mur.
 -Il ne veut pas le croire, n'en comprend pas la raison, il tente de le repousser ce mur. Il s'y infiltre même utilisant tous les stratagèmes, qu'ils soient insidieux, frontaux, détournés peu importe. Il ne le laissera pas s'installer ce mur. Il lui murmure au mur des mots doux, des mots amicaux, des promesses. Il est toujours là le mur. Alors la colère s'installe, les mots sont durs, accusateurs, pleins de reproche. Le mur ne faiblit pas; Alors il le flatte, loue sa beauté, admire son élégance, comprend sa présence. Inébranlable le mur semble se grandir encore, s'épaissir plus imposant que jamais. Infranchissable soit, se dit-il.  Désespéré, il empoigne ses bombes de peinture et le tague, il dessine les contours de la silhouette de son ami que d'un geste malheureux il barre.

M.M.

 


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